Enfin sous ses yeux, vivait le village du Loup. Après tout ce temps passait à marcher, il était arrivé à destination. De nombreux paysages avaient défilé sous ses pieds fatigués. De son pays natal du pays des Bois, Nero avait franchi les forêts pour se rendre au sud, dans les terres venteuses du désert de Suna. Puis, par un heureux hasard, il avait suivi un marchand pour Konoha. Continuant sa route, il avait traversé le détroit pour se rendre à Kiri et finalement, au pays du Loup. L'ermite avait depuis longtemps pris connaissance de l'existence d'un tel village, où se réunissaient les pires canailles des pays shinobis. Alors pourquoi cet homme pieux et humaniste avait-il parcouru tant de kilomètres pour atterrir dans ce nid à fripouille ?

- Oui d'ailleurs pourquoi ?

Celui qui parlait à présent n'était autre que Yatano, l'ami décédé de notre vieil homme. Durant son emprisonnement, il avait légèrement succombé à la folie. Pour se protéger de l'isolement, il avait créé dans son esprit une sorte de spectre représentant son ami. Il était néanmoins peu probable de le voir remuer les lèvres dans la vie réel, car lorsque se manifestait ce genre de conversation, elles habitaient son esprit, non sa chair.

- Ne recommence pas Yata, je te l'ai déjà expliqué. Mon but est de reformer l'ordre du Lotus Blanc, tu crois vraiment que les shinobis des autres villages vont déserter leurs maisons pour me suivre dans ma quête de paix ?

- Non, mais pourquoi les Loups le feraient ?

- Parce qu'ils ont déjà déserté je te rappelle.

- Donc ton but est de recruter des assassins pour former un ordre de paix ?

- … Écoutes, je n'ai pas encore bien définis les limites de ma théorie.

Nero s'était arrêté dans l'allée centrale du village et observait les mouvements de foule dans la rue. Il portait des guenilles en guise de vêtement, des vieilleries grisâtres; propres, mais complètement élimées par le temps. Malgré son hygiène, on aurait cru voir un mendiant. Sa cape de voyage était tout aussi abîmée et sous ses habits, sa peau était sèche, mise à rude épreuve par le sel marin. Ses traits étaient creusés par la fatigue et bien qu'il n'en eut pas l'usage, il se servait d'un bâton de marche de couleur rouge. Il se décida à avancer au milieu des brigands, des assassins et des simples villageois.

Le pays des Loups était en passe de devenir un territoire reconnu et ce, malgré son côté « terre sans loi ». Selon Nero, tout avait l'air normal et d'après les trois villages shinobis qu'il avait visité, celui-là n'était pas si différent. Des commerces avaient fleuri le long des trottoirs et au fond du village se trouvait la bâtisse de l'Alpha. Soulagé d'être arrivé à destination, le vieil homme s'avança d'un bon pas en direction de la taverne du coin. Ce long voyage l'avait épuisé et il aspirait maintenant à se rafraîchir et à s'hydrater.  

- Un bar, toi l'ermite, tu vas rentrer dans un bar ? Tu ne bois plus l'eau des fontaines ?

- Je te rappelle que je suis plus près du mendiant que du moine à l'heure actuelle.

Nero poussa la porte et les conversations se suspendirent l'espace d'un instant et toutes les têtes se tournèrent vers lui. Il ne s'en offusqua guère, ce genre de réaction était commune dans les petits villages où tous les gens se connaissent. Il se dirigea vers le bar et s'assit sur un tabouret libre au comptoir. Les conversations reprirent dans son dos et l'orchestre présent au fond de la salle joua un petit air enjoué. Le bois remplissait l'espace, sur le sol, les murs et même le plafond. A l'origine, cela devait être un endroit charmant. Pourtant, avec le passage des commerçants véreux, celui de l'alcool imbibé sur le sol et le manque d'hygiène du tavernier, la taverne des « Bons Buveurs » était un endroit malfamé et d'aspect répugnant.

Nero contempla le lieu d'un œil amusé et posa son bâton à ses côtés. Il leva une main avec paresse et le serveur, d'un mauvais œil, se tourna vers.

- Qu'est-ce vou-voulez ? demanda-t-il dans un accent étrange.

- Une carafe d'eau, un verre vide et un autre plein de sake je vous prie.

Le serveur leva les sourcils, mais ne dit mots et se retourna pour préparer la commande. Dans la tête de l'ermite en revanche, s'éleva une voix railleuse.

- Ah carrément ! Au diable les enseignements de l'Ordre.

- Je t'ai dit que je souhaitais voir évoluer nos coutumes.

- Si par évoluer, tu sous-entends qu'il faut saouler à mort tous les prétendants, je crois que tu es sur la bonne voie.

Nero eut un mouvement de tête pour chasser son ami de ses pensées et de son geste, il avait bousculé son camarade de comptoir. Il se tourna vers lui et sa bouche, à travers sa barbe, s'ouvrit pour s'excuser :

- Navré monsieur.